À Jérémie, une initiative inédite a été mise en place pour aborder un sujet encore largement tabou : les violences sexuelles et sexistes dans le secteur du Vodou. Cette démarche, portée par la Société Haïtienne d’Histoire, de Géographie et de Géologie (SHHGG), en collaboration avec le Comité National Route de l’Esclave, l’association OFAVA et avec le soutien du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), vise à créer un espace de parole et de réflexion collective.
Du 30 mai au 2 juin, des ateliers ont réuni des femmes et des filles victimes de violences sexuelles, ainsi que des houngans, des mambos et des pratiquants du Vodou. L’objectif de ces rencontres était de discuter ouvertement des causes profondes de ces violences et des mécanismes qui les perpétuent. « Le Vodou, malgré son importance culturelle, n’est pas épargné par les violences sexistes. Nous voulions offrir un espace d’écoute aux victimes, mais aussi responsabiliser les acteurs de ce secteur », explique Prince Neptune, directeur exécutif du Comité National Route de l’Esclave et coordinateur du projet.
À l’issue de ces ateliers, une exposition a été inaugurée dans l’auditorium de l’Université Publique de la Grand’Anse. Intitulée « Vodou et violences sexuelles : briser le silence », elle retrace l’histoire des violences faites aux femmes dans le contexte du Vodou, de la période coloniale à nos jours. L’exposition met en lumière des figures longtemps invisibilisées, comme la femme de Toussaint Louverture, victime de violences physiques, psychologiques et sexuelles lors de l’arrestation de son époux, sous les yeux de leurs enfants.
Guidée par de jeunes guides formés pour l’occasion, l’exposition sera ouverte au public jusqu’au vendredi 6 juin. Son but est de sensibiliser la population, de briser les tabous et d’encourager une réflexion sur la place des femmes dans les espaces culturels et spirituels. « Il est temps de sortir du silence, de regarder cette réalité en face, et de transformer nos espaces en lieux de respect et de protection pour toutes », conclut Prince Neptune.
Cette initiative est une étape importante vers la reconnaissance des violences sexuelles et sexistes dans un contexte culturel et spirituel où ces questions sont souvent ignorées. En donnant une voix aux victimes et en engageant un dialogue avec les acteurs du Vodou, l’exposition et les ateliers espèrent contribuer à un changement durable.
Rédaction Kominotek NEWS