Mercredi dernier, une vague de violence meurtrière a frappé plusieurs zones stratégiques de Port-au-Prince, la capitale haïtienne. Les quartiers de Pacot, Haut Turgeau et Kenscoff ont été le théâtre d’affrontements violents entre des groupes armés et les forces de l’ordre. Ces événements révèlent une stratégie sinistre mais bien orchestrée : étouffer le cœur de la capitale et encercler les zones résidentielles situées en hauteur, encore hors d’atteinte.
Depuis plusieurs mois, les attaques menées par les gangs ne sont plus des heurts sporadiques. Elles traduisent une offensive planifiée visant à :
– Verrouiller les axes majeurs de circulation et d’approvisionnement, comme le Carrefour de l’Aéroport et Delmas 30 ;
– Encercler les zones relativement stables, notamment Pétion-Ville, Canapé-Vert et Haut Delmas ;
– Instaurer un blocus social et économique, forçant l’exode de la population et la paralysie des services.
Les événements du 23 avril ne sont que partie d’un plan plus vaste : fermer la boucle territoriale autour de la capitale. Selon plusieurs observateurs, il s’agit du « plan silencieux » des gangs.
Pacot et Haut Turgeau : une embuscade meurtrière
En début d’après-midi, des combats violents ont éclaté à Pacot et Haut Turgeau. Des brigadiers venus de Canapé-Vert, soutenus par d’autres groupes, tentaient de reprendre le contrôle de ces quartiers. Mais l’opération a mal tourné. Pris dans une embuscade, plusieurs brigadiers ont été tués et d’autres grièvement blessés. Les images circulant sur les réseaux sociaux montrent des scènes d’une brutalité insoutenable.
Les assaillants, lourdement armés, ont opposé une résistance farouche, transformant les rues en véritables zones de guerre. La panique a gagné tout le quartier de Turgeau, poussant écoles, entreprises et cliniques à fermer leurs portes.
Kenscoff en flammes : les hauteurs ne sont plus épargnées
Le même jour, à Kenscoff, une commune située au sud-est de la capitale, des policiers ont été attaqués lors d’une patrouille. Plusieurs agents ont été blessés et un véhicule blindé de la Police Nationale d’Haïti (PNH) a été incendié. Les autorités locales peinent à contenir l’avancée de ces groupes, qui cherchent visiblement à contrôler les voies d’accès aux quartiers résidentiels situés en altitude.
Delmas 30 et Carrefour de l’Aéroport : la paralysie organisée
Au Carrefour de l’Aéroport, un carrefour vital reliant plusieurs quartiers de la capitale, les combats entre la PNH et les gangs se poursuivent. La zone reste tendue, avec des tirs réguliers et une circulation quasi arrêtée. Les populations fuient en masse, cherchant refuge vers des zones encore épargnées comme Haut Delmas.
Selon les données des Nations Unies, 85 % de la région métropolitaine de Port-au-Prince est désormais sous contrôle ou influence des gangs armés. Hôpitaux, écoles, tribunaux : rien n’est épargné. Chaque jour, de nouvelles zones tombent sous leur emprise, resserrant peu à peu l’étau autour de la capitale.
Cette dynamique révèle non seulement l’incapacité de l’État à contenir cette occupation rampante, mais aussi un sentiment croissant d’abandon. La capitale semble livrée à elle-même, prise entre les assauts des criminels et l’inefficacité des institutions.
Les tragédies du 23 avril doivent servir de signal d’alarme. Sans une réponse concertée et dotée de moyens conséquents, Port-au-Prince risque de devenir un territoire entièrement dominé par les gangs, une capitale en ruines sous les coups conjugués de la terreur et de l’abandon.
Rédaction Kominotek NEWS