Dans l’obscurité des anciennes salles de classe transformées en abris précaires, les corps se contorsionnent sous la douleur. Les ongles s’abattent sur des peaux irritées et enflammées. Au Lycée Anténor Firmin, comme dans plusieurs autres camps de déplacés à Port-au-Prince, la gale – surnommée « gratelles » localement – se répand à un rythme inquiétant. Avec elle, une souffrance muette et insupportable s’ajoute aux angoisses quotidiennes de ceux qui ont perdu tout ce qui leur était cher.
Hector, un ancien habitant de Carrefour-Feuille, n’arrive plus à fermer l’œil. Réfugié dans un dortoir surpeuplé du lycée, il montre les marques rouges sur ses bras : « Ça gratte, ça brûle, et ça ne s’arrête jamais. Toute la nuit, on se gratte jusqu’au sang. »
Comme lui, des milliers de personnes sont entassées dans des conditions similaires au lycée Marie-Jeanne, à la Faculté de Linguistique Appliquée, ou encore dans les anciens locaux du ministère de la Communication. Chassés par les gangs armés, privés d’eau potable et d’hygiène de base, ils affrontent maintenant une épidémie qui frappe sans distinction.
« Mon enfant a des plaies, mais je n’ai rien »
Jesusla, une jeune mère, serre contre elle son petit garçon de trois ans dont les bras sont couverts de croûtes. « Le docteur nous a dit que c’était la gale, mais il n’a pas de crème. Et nous, on n’a pas d’argent. »
Le Dr Joaxhim, qui travaille pour une ONG locale, exprime son inquiétude : « On distribue des traitements, mais c’est une goutte d’eau. Tant que les conditions de vie ne s’améliorent pas, le problème ne fera qu’empirer. »
L’épidémie de gale n’est pas seulement une crise sanitaire : elle met en lumière l’ampleur du désespoir humanitaire. Les centres de santé, comme celui de Turgeau qui était autrefois géré par Médecins Sans Frontières, sont fermés ou inaccessibles. Sans soins, sans suivis, les déplacés grattent leur détresse jour et nuit.
Gertrude, réfugiée dans les locaux de la FLA, cache mal sa colère : « On est abandonnés. Il n’y a pas de savon, pas de soins, pas d’avenir. Et maintenant, même nos corps nous trahissent. »
Alors que l’épidémie continue de s’étendre dans les camps de fortune, les appels à l’aide se multiplient. Mais pour les déplacés de Port-au-Prince, l’aide attendue se fait toujours désirer.
Rédaction Kominotek NEWS