Le dernier rapport du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH) met en lumière une dégradation préoccupante de la situation sécuritaire dans le pays. Entre janvier et mars 2025, les violences liées aux gangs, les abus des droits humains et l’aggravation de la crise humanitaire ont atteint des niveaux critiques.
Selon les données collectées par le BINUH, au moins 1 617 personnes ont été tuées, 580 blessées et 161 enlevées durant les trois premiers mois de l’année 2025. Ces chiffres sont principalement liés aux affrontements entre gangs, aux actes de justice populaire, aux violences perpétrées par des groupes d’autodéfense ainsi qu’à certaines opérations de la Police nationale d’Haïti (PNH). Le département de l’Artibonite reste le plus touché, concentrant 63 % des cas d’enlèvements recensés durant la période. Le rapport met en garde contre une dynamique de violence qui ne cesse de s’amplifier, menaçant la stabilité du pays.
La population la plus vulnérable, notamment les femmes et les enfants, est particulièrement ciblée par les violences. Le BINUH recense 333 survivantes de violences sexuelles, dont 96 % ont subi des viols collectifs commis par des membres de gangs. Parmi les victimes figurent également au moins 35 enfants tués et dix autres blessés. Plusieurs cas d’enrôlement forcé de mineurs dans des groupes armés sont également documentés. La traite et l’exploitation d’enfants connaissent une hausse notable, selon des témoignages d’acteurs locaux relayés dans le rapport.
Le BINUH dénonce également 65 exécutions extrajudiciaires présumées, dont 50 seraient imputables à des agents de la PNH et 15 au commissaire du gouvernement de Miragoâne. Deux enfants figurent parmi les personnes tuées dans ces circonstances. Par ailleurs, 25 détenus sont morts en détention au cours du trimestre, soulevant de graves préoccupations quant aux conditions de détention dans les établissements pénitentiaires haïtiens.
Sur le plan humanitaire, la situation des déplacés internes atteint un niveau critique. Au 31 mars 2025, le nombre de personnes déplacées s’élève à 1 041 229, soit une augmentation de 48 % par rapport à septembre 2024. Cette croissance exponentielle témoigne de l’insécurité généralisée et du manque de réponses durables pour les populations affectées.
Face à cette situation dramatique, le BINUH exhorte la communauté internationale à maintenir Haïti dans les priorités globales et à accélérer le déploiement complet de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), dans le respect strict des normes internationales en matière de droits humains. Le rapport recommande également aux États de la région de renforcer les contrôles des cargaisons à destination d’Haïti, dans le cadre de l’embargo sur les armes en vigueur.
Enfin, le BINUH appelle les autorités haïtiennes à mettre en place des pôles judiciaires spécialisés pour juger les crimes de masse, les violences sexuelles et les crimes économiques, à accélérer le processus de vetting au sein de la PNH et à poursuivre les agents impliqués dans des violations graves. Le rapport souligne aussi la nécessité de programmes de réinsertion pour les enfants enrôlés dans les gangs armés.
Rédaction Kominotek NEWS